"MAMAAAAAAAAAAN!" Il ferma les yeux. Un terrible mal de crane l'assaillait. Il sentait une douleur au bras et partout dans son corps mais la seule chose qui occupait son esprit, était sa mère. Cette dernière était étendue sur le plafond de la voiture. Le véhicule avait été percuté juste après un feu tricolore par un chauffard qui avait pris la fuite. Le véhicule avait fait trois tonneaux avant de s'immobiliser quelques mètres plus loin, sur le bas côté de la route à présent déserte. Cooper qui se trouvait sanglé à l'arrière du véhicule avait eu plus de chance que sa mère. Il n'avait pas été grièvement blessé contrairement à sa mère. La jambe bloquée par le siège du passager, le petit garçon de sept ans ne pouvait pas bouger. Il était juste à quelques centimètres de sa mère qui reprenait doucement conscience. Elle posa ses yeux sur son fils. "Cooper?" Sa voix était faible et on pouvait y ressentir la douleur. Elle avait du sang partout sur elle et même s'il n'était qu'un gosse, Cooper savait que la situation était critique. Il ne savait pas quoi faire. Il essayait de bouger mais sa jambe était douloureuse. Il se sentait impuissant et des larmes de tristesse et de douleur coulaient sur ses joues pales. "...Tu n'as rien mon cœur?" Le jeune garçon secoua la tête. Lauren Darrens observait son fils. Sa respiration était difficile. Le garçon se mit à pleurer. Il finit par tendre la main, faisant un effort monstre pour attraper celle de sa mère. Le froid commençait à l'engourdir et il avait des difficultés à garder les yeux ouverts. Sa main dans celle de sa mère, Cooper serrait fort ses doigts comme pour dire à sa mère qu'il restait là avec elle. Leurs regards ne se lâchaient pas mais Lauren finit par fermer les yeux pour toujours, emportée par une hémorragie interne. L'ambulance était arrivée une quart d'heure plus tard. Trop tard pour sauver Lauren qui n'avait pas survécu à ses blessures. Le petit garçon avait été conduit à l'hôpital. Le même hôpital où exerçait son père, un chirurgien très réputé. Ce dernier avait été averti de l'accident. Divorcé depuis cinq ans, il n'avait que peu de contact avec son ex-femme et voyait son fils, un week-end sur deux. Autant dire, que ce soir là, Cooper se retrouva seul au monde. Il avait perdu le seul soutien de sa vie et la seule personne qui avait fait attention à lui.

"Tu devrais faire plus attention. C'est très médiocre." Les yeux posés sur son fils, Grant soupira une nouvelle fois. Il rendit la copie à Cooper qui se trouvait assis au bureau de sa chambre. Il faisait des efforts avec ses devoirs mais cela ne semblait jamais satisfaire son père. Ce dernier attendait de lui, la perfection. Sauf que le gamin de 12 ans, n'était pas parfait. Il luttait contre la dyslexie pour avoir une scolarité normale et son père ne l'encourageait même pas. Il avait eu un B en cours d'histoire mais cela ne semblait pas satisfaire le docteur Darrens. Le jeune garçon ne répondit rien, laissant son père quitter la pièce pour retourner au salon. Il avait été fier de lui montrer sa note et son père l'avait à peine regarder. Depuis la mort de sa mère, Cooper vivait chez sa tante, Martha, la soeur aîné de sa mère qui était marié mais n'avait pas d'enfants. N'ayant pas le temps de s'occuper à plein temps de son fils, le docteur Darrens avait accepté que la garde soit confié à Martha. Les relations entre le père et le fils s'étaient encore plus distandues au fil des années. Il n'y avait jamais eu beaucoup de complicité entre eux et c'était encore pire à présent. Cooper ne faisait plus d'effort pour avoir la reconnaissance de son père. Il tentait de faire son bonhomme de chemin sans chercher l'approbation du chirurgien. Dans ses études, il faisait des efforts mais il n'était pas le fils prodigue. Il était intelligent mais il avait des problèmes pour écrire et lire parfois, à cause de sa dyslexie. Il voyait un orthophoniste chaque semaine et sa dyslexie lui gachait moins sa scolarité. Quant aux relations avec son père, il n'avait trouvé aucun moyen de les rendre plus sereines. Finalement, il s'était tourné vers ses amis. Il passait beaucoup de temps avec eux. Ce qui lui permettait d'oublier les cauchemars qui rongeaient ses nuits.

Il avait l'enveloppe dans ses mains, assis sur les marches du perron. Il venait de recevoir une lettre qu'il attendait depuis une semaine. Dans ses mains, il tenait les résultats de son entrée chez les pompiers de la ville. Il avait fini ses études depuis le début de l'année et il avait passé le concours d'entrée chez les Firemen quelques jours après. Il était pompier volontaire depuis l'âge de quinze ans. Mais il savait que cela ne garantissait pas son entrée dans une caserne. Pourtant, c'était ce qu'il voulait faire. Depuis la mort de sa mère, il s'était juré de ne plus rester aussi impuissant face à ce genre de situation. Alors c'était tout logiquement qu'il s'était dirigé vers les pompiers secouristes. Il aurait très bien pu être médecin comme son père mais il ne pouvait pas tenter une école de médecine à cause de sa dyslexie. Cette dernière n'était pas partie et elle redoublait même quand il était fatigué. Alors il était impossible pour lui de rester des heures devant un devoir ou un travail écrit. C'était impossible. Il n'avait pas besoin de faire des études pour être chez les pompiers, enfin beaucoup moins que s'il avait fait une prépa médecine. Il a bossé très sérieusement son concours et les différentes matières jusqu'à très tard le soir alors qu'il avait décroché un emploi dans le bâtiment. Depuis qu'il était en âge de travailler, il n'avait jamais été à la charge de quiconque. Il avait toujours travaillé. Et en attendant son éventuelle entrée chez les pompiers de Raleigh, il avait trouvé un job qui lui permettait de gagner de l'argent. La porte de la maison finit par s'ouvrir. Martha observa Cooper qui n'avait toujours pas bougé depuis une bonne heure. "Tu vas finir par l'ouvrir cette lettre?" Elle esquissa un tendre sourire avant de s'approcher de son neveu et de s'asseoir à ses côtés. Elle était vêtue d'un tablier rose pale. "Et si c'est négatif?" Martha leva ses yeux verts sur lui. "Tu recommenceras... mais je suis certaine que tu as réussi. Alors ouvre." Elle encouragea Cooper du regard. Jamais depuis la mort de sa mère, une personne l'avait soutenu comme le faisait Martha et il lui en était reconnaissant. Et ce dernier finit par décacheter l'enveloppe. Il en tira une feuille qu'il se mit à lire. Un sourire naquit sur ses lèvres. Martha comprit alors la signification de ce sourire. Elle prit Cooper dans ses bras avant de dire. "J'ai fais un gateau au chocolat pour fêter ça. Viens!" Cooper ne mit pas longtemps à la suivre, mettant dans la poche arrière de son jean, son sésame pour les hommes du feu de Raleigh.

▬ 11 mai 2012. Club. Moon Square. Raleigh.
Il posa sa bière sur la table et observa ses amis commander une autre tournée. Il venait de sortir de la caserne et il voulait se détendre un peu. C'est pourquoi il passait parfois ici, dans ce club pour boire une bière avec ses amis et écouter un peu de musique. Parfois il occupait lui même la scène. Cooper chantait et jouait de la guitare depuis qu'il avait une dizaine d'années. La musique était une de ses passions. Avec son métier très prenant et stressant, la musique et les mélodies à sa guitare le décontractait. Alors il venait de façon régulière dans ce club de la ville. Et ce soir là, ses yeux marrons se posèrent sur une jolie blonde qui venait de monter sur scène. Il l'observa se préparer avec les musiciens. Puis sa voix l'emporta et c'est tout naturellement qu'il allait la trouver à la fin de sa chanson. Il l'invita à boire un verre. Et c'était le début de leur histoire. Cooper avait eu un tas de petites amies mais il ne s'était jamais réellement impliqué. A vrai dire, aimer c'était une malédiction dont il était certain qu'elle ne pourrait que le faire souffrir à un moment donné. Alors il s'était approché de Maegan sans croire que leur histoire pourrait marcher. Cooper était plutôt du genre à vivre au jour le jour, sans faire de projet parce qu'il ne savait que trop bien que la vie était imprévisible et qu'il fallait en profiter tant qu'il était encore temps. Ce soir là, il raccompagna la demoiselle chez elle et sur le chemin du trajet, il s'était surprit à se dire que finalement, une vie à deux, pourrait être sympa.

▬ 20 octobre 2012. Fayetteville street. Raleigh.
"Message reçu. Nous arrivons!" Cooper avait raccroché le micro à la radio de la caserne. Un accident venait d'avoir lieu au carrefour principal de la rue Fayetteville. Habillé en tenue de secouriste, il monta dans l'ambulance, direction le centre de Raleigh. Depuis deux ans, Cooper avait obtenu le titre de "paramedic". Il avait suivi des cours pour être secouriste. Un financement interne à la caserne avait pu réaliser ses projets. Cela faisait des années maintenant qu'il ne parlait quasiment plus à son père. Il avait fait sa vie de son côté. Et tut ce que Cooper avait dans son existence, c'était grâce à ses propres efforts et à rien d'autre. Pendant le chemin, le jeune homme vérifia son matériel une seconde fois. Le policier qui avait laissé un message radio avait parlé de trois victimes dont deux dans un état grave. Tout le nécessaire avait été préparer dans le véhicule pour prendre en charge le plus gravement touché. Une seconde ambulance suivait la première, laissant entendre la sirène dans les rues calmes de la ville. Une fois sur les lieux, Cooper se rendit compte que la situation était plus grave. Quatre véhicules avaient été impliqués dans un accident. L'une des voitures était retournée sur le toit et une seconde encastrée dans un poteau de signalisation, par le côté passager. Il donna les directives à son équipe avant de s'avancer vers la voiture retournée. Là, il posa son sac par terre et se mit à genou pour jeter un œil à l'intérieur. Il se blessa au main à cause des morceaux de verre sur le sol. Les deux passagers de l'avant étaient encore bloqués par leurs ceintures. Cooper prit la tension et se rendit compte que le premier, un homme était mort. La femme qui se trouvait à ses côtés était blessé à la tête et ne réagissait à aucun stimuli de l'urgentiste. C'est alors qu'il sentit une légère pression sur sa main. Il baissa son regard et aperçu un petit bonhomme à l'arrière. Ce dernier était recroquevillé sur lui même. Il n'avait pas mit sa ceinture et gisait sur le bitume. "Hey bonhomme..." Il prit le pouls du garçonnet tout en lui parlant. "Comment t'appelles-tu? Tu as mal quelque part?" Du sang s'écoulait des oreilles du petit et Cooper savait que c'était mauvais signe. "Tommy." Sa voix était faible et son rythme cardiaque montrait des signes de tachycardie. "Ça va aller, je vais m'occuper de toi d'accord?" Le petit garçon ne le lâchait pas du regard, acquiesçant à ses propos. Cooper se tourna pour crier à son équipe. "Il faut procéder à une désincarcération, vite!" Malgré tout ses efforts, Nathan a perdu la vie dans l'ambulance qui le menait à l'hôpital, tout comme sa mère. Cooper restait silencieux dans l'ambulance, observait les deux corps inertes, du sang sur son uniforme bleu foncé. "Coop'. Tu as fais ce que tu as pu..." Le secouriste garda ses yeux sur le garçon. Parfois... il détestait son job et sa vie.

▬ 23 octobre 2012. Appartement de Meagan. Raleigh.
Cela faisait trois jours qu'il n'arrivait plus à dormir. Dès qu'il fermait les yeux, les images de l'accident de sa mère se juxtaposaient à celle de l'accident de Fayetteville. Au boulot, il était sans arrêt sur le qui-vive ce qui faisait qu'il était exténué. Il tenait tant bien que mal de se reposer mais rien n'y faisait. Le sommeil semblait l'avoir quitté. De plus, il enchainait les gardes à la caserne et ses journées étaient interminables. Ce soir là, il avait finalement décidé d'aller boire un verre dans l'un des bars de Raleigh. Cela faisait trois fois qu'il tentait d'appeler Maegan mais cette dernière était injoignable. Elle devait être avec son frère. Ces deux là étaient inséparable et il devait faire des efforts pour trouver une place dans la fratrie. Accoudé au bar, il buvait une troisième bières tout en jetant un oeil à l'écran plasma au dessus du bar. La chaine sportive retransmettait un match des Panthers de Caroline. Mais bien que ses yeux observaient l'écran, ses pensées vagabondaient ailleurs. C'est alors qu'une voix familière résonna à ses oreilles. "Tu permets?" Cooper posa ses yeux marrons sur la jeune femme. Julia était une amie de Nathan, le frère de Meagan. Ils discutèrent un bon moment, ce qu'il n'était pas arrivé très souvent à Cooper ces derniers temps. Parler à quelqu'un lui avait fait du bien, même s'il n'arrivait pas à se sortir de cette langueur dans laquelle il se trouvait. A la fin de la soirée, il s'est retrouvé dans le lit de la demoiselle. Rien n'avait été prémédité, cela s'était fait comme ça... Et le réveil avait été difficile.


EVERYBODY'S CHANGING
[justify]▬ 25 octobre 2012. Appartement de Meagan. Raleigh.
"Je sais qu'aucune de mes paroles ne pourra soulager ta peine. C'était une erreur..." Il se trouvait dans la salon, assis sur un fauteuil alors que son regard se portait sur Meagan et les larmes qui coulaient sur ses joues. Il savait qu'il lui avait fait du mal. Il savait que cette tromperie l'avait blessé. Mais l'erreur était commise et il ne pourra pas la réparer même s'il le voulait. Il avait eu une aventure avec cette Julia. Il avait bu, il était mal et c'était arrivé. Ce n'était pas une excuse et Cooper n'en cherchait pas. C'était juste arrivé. Mais il n'avait pas voulu cacher la vérité à sa compagne et il le lui avait dit. Il savait qu'il allait la blesser mais il lui devait la vérité. Ils étaient ensemble depuis huit mois et jamais ils ne s'étaient caché quoique ce soit. C'était peut-être ce qui avait fait la réussite de leur histoire, jusqu'à aujourd'hui. Cooper ne savait même pas s'il avait envie qu'elle lui pardonne. Il ne savait pas s'il était réellement près à faire des projets avec elle, à voir plus loin qu'un amour de passage. Oui il avait des sentiments pour elle, c'était certain mais c'était justement ce qui lui faisait peur parfois. Est-ce qu'il était prêt à vivre cette histoire? Il n'en savait rien. Sa vie était chaotique et son métier lui faisait côtoyer la mort chaque jour. Ce n'était pas des éléments propices à établir un bon équilibre de vie. Cooper observait Meagan. "Je n'ai pas envie de te perdre..." Et cela c'était la stricte vérité. Il aimait Meag même s'il était encore trop orgueilleux pour le lui dire à voix haute. Il appréciait les moments qu'ils passaient ensemble. Mais son passé le hantait encore et il se demandait s'il était prêt à laisser la femme qu'il aime découvrir ses failles et ses zones d'ombre.

▬ 03 novembre 2012. Appartement de Cooper. Raleigh.
Meagan lui a donné une seconde chance. Il fait encore parti de sa vie. Ce jour là quand il a vu les larmes couler sur les joues de sa compagne, il avait compris à quel point la vie pouvait être amère. Elle vous donne tout et vous reprends tout au moment où vous pensez être enfin heureux. Oui il est heureux avec elle. Oui il l'aime mais est-ce suffisant pour construire une histoire? Cooper n'en sait rien. Il se demande si Meag ne mérite pas de vivre avec un autre homme? Il a l'impression d'être un aimant à malheur et qu'une malédiction le poursuit depuis ses six ans. Elle se manifeste à intervalle irrégulier pour lui rappelait à chaque fois, qu'il ne pourra jamais être pleinement heureux. Que le bonheur ce n'est pas pour lui et que chaque acte a une signification. Il a couché avec Julia après avoir bu plus que de raison. Mais était-ce vraiment l'alcool qui l'avait poussé à tromper sa compagne ou juste l'envie de tendre le fil de son existence et voir si ce dernier restait solide et ne se cassait pas? Il n'en savait rien. Il était dans le flou le plus complet. En attendant, il préférait prendre son temps et laissait du temps à Meag pour qu'elle puisse passer ce cap. Il s'était réinstallé dans son ancien appartement même s'il voyait régulièrement la jolie blonde. Quant à Nathan, le petit frère de cette dernière, il ne lui parlait plus. Comment Cooper aurait pu savoir que cette Julia était la fille qu'il aimait? Il soupira. Il jeta un œil au réveil. Il était près de 04 heures du matin. Il se leva de son lit et alla prendre sa douche. Il n'arrivait pas à dormir. Autant se rendre à la caserne. Là il pourra se sentir utile et s'occuper pour oublier tout ce qui n'allait pas dans sa vie.