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♘ .ReedNight

« Bonjour, bureau de Madame Keshawn, que puis-je faire pour vous ? Demanda-t-il tel un automate lorsqu’il décrocha le téléphone.
- C’est moi. Est-ce que Mademoiselle Fitzpatrick est déjà arrivée ?
- Oui, à l’instant. Elle est dans la salle d’attente.
- Décommande mon rendez-vous. Dis-lui que j’ai été retenue à mon séminaire. Fais lui parvenir un bouquet de fleurs avec un petit mot, qu’elle pense que je suis sincèrement désolée… Et si mon mari appelle, dis-lui que mon séminaire a été prolongé d’une journée.
- D’accord, bonne soirée Madame Keshawn. »
La vie privée de sa supérieure ne l’intéressait d’aucune façon, le jeune homme se contentait seulement d’obéir pour toucher un chèque à la fin du mois. Ce n’était pas la première fois qu’il couvrait ses aventures extraconjugales. Parfois il pensait qu’elle avait décidé de l’engager uniquement parce qu’il savait mentir ou garder un secret, qualités qui faisaient sûrement de lui un assistant exemplaire. Son job n’était que temporaire, il ne comptait pas apporter le café, faire des photocopies ou transmettre des messages jusqu’à la retraire. De toute évidence, il ne resterait pas éternellement à Raleigh, quelques mois suffiraient à réapprovisionner son compte en banque avant de prendre la route vers New York en compagnie de son meilleur ami. Voyager, enchainant des expériences toutes plus diversifiées, le maintenait libre et vivant. Il ne s’imaginait pas emprisonné dans une routine et risquer de devenir aussi malheureux que Madame Keshawn.

En quelques clics, Blake choisit une petite plante verte accompagnée d’un mot d’excuse signé par sa patronne qu’il adressa au domicile de Mademoiselle Fitzpatrick. Il paya avec la carte bancaire de l’entreprise qu’on lui avait confiée. Ensuite, le garçon se pencha en avant sur son bureau pour jeter un œil discret en direction de la jolie brune. Celle-ci semblait confortablement installée sur un canapé, un magazine à la main. Prétendre qu’elle le laissait indifférent serait un mensonge. En effet, le Californien la trouvait particulièrement attirante. La subtilité n’avait d’ailleurs jamais été son fort. Devait-il profiter de l’absence de sa supérieure pour tenter de tourner la situation à son avantage ? Quelques instants plus tard, il débarqua dans la salle d’attente avec deux tasses de cafés. Souriant, il en tendit une à son interlocutrice puis s’assit à ses côtés. « Madame Keshawn aura un peu de retard. » Mensonge qu’il camoufla derrière un regard courtois. Il avait saisi l’opportunité de passer un peu de temps avec celle qui lui plaisait tant, personne ne pourrait le blâmer. « Elle m’a demandé de vous tenir compagnie jusqu’à son arrivée, sauf si évidemment vous préférez rester seule. Je m’appelle D. A. »

Daniel-Asher avait déjà eu l’occasion de la croiser à plusieurs reprises ces dernières semaines sans pour autant échanger plus que de simples banalités. Lemon avait été désignée par sa supérieure pour un projet important. Une énième célébrité leur avait acheté un magnifique terrain en Caroline du Nord pour y bâtir sa résidence secondaire. En tant que responsable du service communication, Madame Keshawn préférait s’assurer au préalable que les idées de Lemon pourraient correspondre aux attentes de l’acteur hollywoodien avant d’arranger un éventuel rendez-vous. Autrement dit, si Lemon s’avérait suffisamment convaincante aux yeux de Madame Keshawn, l’architecte pourrait collaborer avec les équipes de l’entreprise de promotion immobilière pour la construction de la maison. Projet pour lequel D. A. ne prêterait absolument aucune attention, si ce n’était pour les yeux noisettes de la belle architecte.

Levée à six heures et demie, Lemon Fitzpatrick avait commencé la journée rudement : elle avait été appelée dans le bureau de son supérieur ! Après plus de trente minutes d'interrogatoire -ce que lui, appelait discussion- elle était ressortie, soupirant de soulagement. L'homme avait beau être un ami de la famille, il ne ménageait aucunement sa nouvelle recrue, chose pour laquelle Lemon lui était reconnaissante, mais il plaçait aussi tout ses gros projets, ses espoirs et ses meilleurs clients, sur les épaules de la jeune diplômée ! Sortie depuis seulement un an de Duke, elle n'avait pas encore beaucoup d'expérience, même si les trois projets qu'elle avait jusqu'ici menée seule avait été un franc succès ! Cette fois-ci, il l'avait placé sur un projet désiré par un acteur d'Hollywood. « Pleins d'ennuis en vue ! » avait-elle alors déclaré à ses sœurs, ainsi qu'à ses parents quand elle les avait eu au téléphone. Pendant que ses parents profitaient enfin d'une pause bien méritée, Lemon tentait de ne pas angoissé sous les nombreuses responsabilités qui lui tombaient dessus ! « Tu devrais être heureuse ! Ça prouve qu'ils ont confiance en toi et ça démontre ton talent. » la bonne parole d'un père fière, mais aussi ambitieux que son aînée, qui n'avait jamais manqué d'audace et de courage, pour arriver à bout de ses projets.
Alors qu'elle se dirigeait vers le coin qui lui servait de 'bureau', elle entendit son supérieur, dans son dos, lui rappeler son rendez-vous de neuf heures avec Keshawn, la femme qui avait demandé les services de la jeune Fitzpatrick pour ce projet. Bien qu'elle soi rattachée à une entreprise, Lemon aimait travaillée en solo : donner ses propres idées et sa vision d'une maison, en fonction de la personne -et du compte bancaire!- de la personne qui louait ses services et ses bons conseils. Contrairement à certains de ses collègues, qui travaillaient toujours à plusieurs sur des projets communs, s'était la seule note de favoritisme que son très cher supérieur lui accordait : l'indépendance et la chance de se démarquer. Elle savait que pour se faire un nom et par la même occasion, une clientèle dans ce milieu, elle devait commencer par travailler sous les ordres de quelqu'un et de préférence, de quelqu'un de douée ! Elle avait ici comme mentor le meilleur architecte, qui allait prendre sa retraire dans les quelques années à venir. Dès qu'il déléguerait un peu, Lemon saisira l'occasion de prendre son envol et d'ouvrir sa propre boite, pour devenir indépendante : elle avait les moyens, le soutient et le talent pour y parvenir. Mais en attendant, elle devait se rendre à son rendez-vous !

Neuf et quart, toujours pas de Keshawn en vue. Elle jeta un coup d’œil sur sa montre et replongea le nez dans son magasine. 'Elle' le pêché mignon de la jeune femme, obsédée de mode ! Durant son enfance, elle rêvait de faire carrière dans ce domaine, au début de son adolescence aussi, puis était devenue plus posée, avait prit en maturité et avait saisi une voix plus... simple et saisissable !
Quelques minutes plus tard, elle vit le secrétaire de son employeur venir vers elle, une tasse de café dans chaque main. Après lui avoir dit que Keshawn serait en retard, il lui dit dans un sourire « Elle m’a demandé de vous tenir compagnie jusqu’à son arrivée, sauf si évidemment vous préférez rester seule. Je m’appelle D. A. »
Pour une raison quelconque, Lemon ne put retenir un petit sourire devant le jeune homme. Elle connaissait déjà son nom de famille, pour avoir entendue sa patronne l'appelée 'Blake', mais ne connaissait pas son prénom. D'ailleurs, elle fut surprise en l'entendant, puis se remonta rapidement les idées, après avoir compris qu'il s'agissait en réalité d'initiales. Elle lui tendit, professionnellement, une main et se présenta à son tour « Je m'appelle Lemon Fitzpatrick » et après avoir bue une gorgée de café, lui fit un signe de tête vers sa tasse « merci pour le café. Vous pouvez rester, un peu de compagnie me fera le plus grand bien ! ». Encore un sourire, puis Lemon referma son magasine, le remit dans son sac et s'adossa à l'oblique vers son interlocuteur. « Mais, si vous avez du travail, ne vous dérangez pas pour moi ! Je vous promets de ne rien dire à Madame Keshawn ! ».

Le jeune homme lui serra la main, plongeant son regard émeraude dans le sien. Ses pensées se voulaient distraites, pour ne pas dire déplacées. En effet, il voulait l’embrasser tendrement sur les lèvres puis passionnément dans le cou avant de la déshabiller sauvagement, tel un amant dévoué. Il connaissait déjà son nom et son prénom, ils étaient mentionnés sur quelques papiers qu’il avait eus entre les mains depuis l’initiation du projet immobilier. Blake ne saurait expliquer l’étrange sensation qu’il éprouvait au contact de la belle. Incontestablement, elle ne le laissait de glace ; il ne pouvait le nier. Cependant, elle s’avérait différente des demoiselles qu’il avait l’habitude de charmer lorsqu’il sortait en discothèque par exemple. Pour une raison qu’il ignorait ou qu’il ne voulait peut-être pas admettre, il avait, pour une fois, envie de jouer dans les règles de l’art. Séducteur confirmé, il n’attachait d’ordinaire pas grand intérêt à la gent féminine. Elle ne représentait à ses yeux qu’un simple jeu auquel il ne faisait pas bon de perdre et où l’orgasme symbolisait la victoire. Il n’avait d’ailleurs jamais été impliqué dans une relation sérieuse et se plaisait ainsi. Il parcourait les routes des États-Unis avec Alez, il n’avait besoin de personne d’autre à ses côtés. « Enchanté Lemon. » Répondit-il en tâchant de revenir à ses esprits, dissimulant ses désirs brûlants derrière un sourire toujours aussi courtois. D’après ses dires, sa compagnie ne la dérangeait pas. Il en était réjoui, d’autant qu’elle ne restait ici que parce qu’il lui avait menti sur la situation de sa supérieure. Madame Keyshawn ne passerait pas au bureau. Il était encore trop tôt pour culpabiliser, il espérait néanmoins qu’elle ne perdrait pas son temps avec lui, sans pour autant être convaincu qu’il pouvait l’intéresser.

En l’entendant le vouvoyer, D. A. réalisa qu’il aurait certainement mieux fait de la tutoyer dès le début. Du moins, il se permit désormais de prendre cette liberté, l’invitant implicitement à en faire de même. « Offrir le café aux invités fait partie de mon job. Et je ne pouvais pas te laisser attendre seule, que Madame Keyshawn le veuille ou non. » Répliqua-t-il plus avenant, saisissant l’opportunité de placer un compliment déguisé. Il avait de plus toujours eu une aisance particulière pour aller à la rencontre des gens. Il aimait plaire certes mais s’avérait également sociable et à l’écoute de son entourage. « Passionnée de mode ? Ou à la recherche de nouvelles idées de recettes minceur ? » Demanda-t-il avec humour pour lancer la conversation. Il avait eu le temps de jeter un œil à la couverture du magazine féminin qu’elle lisait, avant qu’elle ne le range dans son sac à main.

Décidément, Lemon ne pouvait s'empêcher de sourire face à ce jeune homme. Il avait la tchatche et semblait aucunement ennuyé de rester à ses côtés, ce qui détendit légèrement la jeune femme, qui ne voulait pas le retenir 'contre son gré'. Puis, elle se rendit compte que le fameux D.A était le premier assistant sympathique et aussi simple qu'elle avait rencontré en un an ! Elle avait désespéré de faire face à des personnes qui n'étaient pas sous l’emprise de la pression et du stress, mais elle se rendit compte qu'il y avait encore quelques exceptions, même dans ce milieux. En l'entendant la tutoyé, elle ne tiqua pas et décida d'en faire de même : « Et bien, si me tenir compagnie et me servir du café fait parti de ton boulot, je vais en profiter » nouveau sourire et elle but une nouvelle gorgée de son café.
Elle ne savait pas pourquoi, mais pour une fois, elle n'était pas tendue en compagnie de quelqu'un faisant partie de ce milieu . Le jeune homme réussissant pleinement à la mettre à l'aise et à lui changer les idées. Elle eut un petit rire en entendant sa question, mais lui répondit le plus sérieusement du monde -petit sourire en coin, tout de même : « Je recherche quelques petites inspirations dans ces magasines. Ça m'aide à coordonné les choses entre elles, que ça soit des vêtements ou des meubles... Quand on y réfléchit, on se rend compte que tout est en rapport, dans le milieu de l'art. Enfin, je ne vais pas vous embêter avec mes idéologies et ma manière de travailler ! » et, ajoutant avec un petit haussement d'épaules « et puis, pour quelques bonnes recettes minceurs aussi ! Même si le sport est bien meilleur que les régimes ».
Elle sentit son portable vibré et s'excusa auprès du jeune homme et décrocha en s'éloignant de quelques pas. Son père, évidement ! « Ne t'inquiètes pas, tout se passe bien... Oui, je te le promet ! Oui, que je te dis... Bon, je dois te laisser, je te re-sonne ce soir sans faute ! » et sans laisser le temps à son père de dire quoi que ce soi de plus, elle raccrocha sur un « bisous ». Revenant sur ses pas, elle se rassied à sa place initiale et s'excusa. « D.A sont les initiales de quels prénoms ? » retrouvant son petit sourire en coin, elle planta son regard dans les yeux de son partenaire.